Extraterrestre au même titre que Platini, Douillet ou Killy, le rugbyman Serge Blanco était hier à Colmar.
Devenu président des pros, cet artiste a gagné un nouveau match : celui de la modestie.
SIMPLE comme bonjour
Simple comme Blanco. Il est à peine arrivé au Rapp que le plus glorieux international qu’a connu le rugby français ces 20 dernières années (au moins) écoute Roger Fontorbes, André Laudet et Patrick Daguzan, les président et entraîneurs du Colmar RC, fatigués par les interminables déplacements de N3 et les frais que ceux-ci génèrent. La réplique de Serge est immédiate : « Même si ce n’est plus forcément pour longtemps, j’ai été élu à la tête de la Ligue pro jusqu’en 2004, les assure-t-il. Mais cela ne m’empêche pas de songer fort à l’intérêt supérieur des petits, donc du rugby français. Ainsi, je me demande s’il ne serait pas opportun de scinder l’hexagone des amateurs en quatre et de faire systématiquement monter les quatre vainqueurs de ces régions en D2 pro. Cela permettrait un brassage intéressant. »
Venu pour souffler la première bougie de la boutique portant son nom et gérée par Philippe Kalt, arbitre d’élite… de foot (« Nul n’est parfait » plaisantera plus tard l’idole des jeunes d’hier et d’aujourd’hui), Serge Blanco est à Colmar comme chez lui, lui qui a spontanément promis de revenir pour donner un coup de main aux jeunes du Collège Molière qui ne peuvent pas toujours s’entraîner à leur guise. Le Biarrot est aussi heureux de serrer chaleureusement la main de Pierre Bride, international en 47 et fondateur du Colmar RC il y a 40 ans, tout comme il est ravi de pouvoir saluer tous ceux qui, dans le Haut-Rhin, suent à longueur de semaines pour faire vivre le ballon, de la cour de l’école et de l’usine jusqu’à la pelouse.
À Mulhouse, le marché de Noël
Comblé par le sourire d’Antoine Juarez (Peugeot) et de Charles Deyber (RCM) qui lui rappellent que c’est à Mulhouse « il y a 7-8 ans de cela, que j’ai découvert les marchés de Noël et la fabuleuse ambiance des fêtes », franchement comblé encore de savoir que Guy Meyer (Chalampé), Marcel Claerr (Thann), Georges Winckler (CD 68) et leurs staffs s’activent tous les jours pour fortifier les effectifs des jeunes, celui qui n’a été personne d’autre que le funambule du rugby international du plus haut niveau est jovial : « Si, aujourd’hui, je fais tout ça, c’est d’abord parce que ça me plaît. Si je m’amuse à vendre des vêtements — chers, parce qu’ils sont fabriqués en France -, je n’oublie pas qu’au départ, je me suis lancé dans l’aventure pour rigoler. Mes maillots étaient si épais qu’il n’y avait besoin de rien d’autre pour passer l’hiver… Idem pour la thalasso. Curieusement, aujourd’hui, c’est la Ligue pro, pour laquelle je ne touche pas le moindre argent, qui me bouffe le plus de temps… »
Kronenbourg et Djakaria
Partisan inconditionnel d’un rugby plus implanté que jamais, convaincu que les droits de télé ne diminueront jamais (« Après le foot, le rugby est un enjeu total pour la TV »), désireux d’harmoniser les calendriers internationaux et de créer, avec l’entier soutien du président fédéral Bernard Lapasset et du syndicat des joueurs, « une structure commerciale qui n’existe dans aucun autre sport et qui serait destinée à vendre notre sport dans sa globalité, et pas seulement les activités des pros »), celui qui fut un véritable artiste sait encore se souvenir que le FC Kronenbourg et Djakaria (parti plus tard à Biarritz) ont été, en leur temps, des pionniers de belle envergure et qu’avec Philippe Grandemange et Yvan Vivin, il s’était fait plaisir contre les Japonais en 85 à la Meinau (autant, en tout cas, que le Lutterbachois René Labit qui, ce soir-là, officiait le long de la touche). À cet instant, Serge n’a plus guère que le temps de confesser que c’est d’avoir su fonder une famille, deux grands fistons à la clé, qu’il est le plus fier. « C’est ce à quoi j’aspirais car, quand j’étais petit, je n’en avais pas eu ! ».
Didier Juilleret, un des purs de l’AS Chalampé, ne manque pas alors de remercier discrètement Serge de tant de spontanéité. « Vous nous avez tant transporté d’allégresse quand vous étiez avec les Bleus que nous nous devions bien de vous rendre hommage aujourd’hui » murmure-t-il, impressionné. Cet authentique poète de l’ovale s’en va alors rejoindre Peggy Kalt et sa boutique. Le rêve passe, le business reste. Pour rigoler, évidemment…